Carte Blanche à Ariane Brisson
Conservatoire de musique de Montréal

En compagnie de Rose Naggar-Tremblay, Meagan Milatz et Cameron Crozman, Ariane Brisson vous convie à ce voyage où les poésies de Mallarmé, Évariste de Parny et Klingsor rencontrent la musique de Crumb, Saariaho, Ravel et Debussy.
Programme
Claude Debussy
: Syrinx pour flûte seuleClaude Debussy
: Prélude à l’après-midi d’un fauneArrangement :
Samazeuilh/Mulleman pour flûte, violoncelle et pianoMaurice Ravel
: La flûte enchantéeGeorge Crumb
: Vox Balanae pour flûte, violoncelle et pianoVocalise (.. for the beginning of time)
Variations on Sea-Time
Var I. Archeozoic
Var II. Proterozoic
Var III. Paleozoic
Var IV. Mesozoic
Var V. Cenozoic
Sea-Nocturne (… for the end of time)
Claude Debussy
: Trio en Sol Majeur L. 5I. Andantino con moto allegro
II. Scherzo – Intermezo
Moderato con allegro
III. Andante espressivo
IV. Finale
Appassionato
Kaija Saariaho
: Mirrors pour flûte et violoncelleMaurice Ravel
: Chansons MadécassesI. Nahandove
II. Aoua
III. Il est doux
Mot de la directrice musicale
Par la composition de ce programme, j’ai voulu mettre en lumière toute la musicalité des mots et la poésie de la musique. J’ai choisi ces œuvres de Debussy, Ravel, Saariaho et Crumb parfois pour leur beauté évocatrice, d’autres fois pour la poésie qui s’y dégage.
Le concert débute avec deux œuvres majeures dans le répertoire de Claude DEBUSSY. Syrinx est une courte musique de scène composée par Debussy pour la pièce de théâtre Psyché, de Gabriel Mourey, dont nous avons malheureusement aujourd’hui perdu presque l’entièreté du texte. Syrinx, c’est également le nom donné à la flûte de Pan, ce dieu grec mi-homme, mi-bouc qui pourchassait les nymphes. Enfin, syrinx, c’est le nom donné à l’organe des oiseaux qui leur permet de chanter des vocalises.
On retrouve ce même Pan dans le Prélude à l’après-midi d’un faune de DEBUSSY, chef-d’œuvre orchestral inspiré du poème éponyme de Stéphane Mallarmé. L’œuvre débute par une arabesque à la flûte composée de chromatisme et de gammes par tons qui jettent les bases d’une modalité floue s’éclaircissant seulement aux dernières mesures de l’œuvre. Par son caractère lancinant, on imagine bien ce faune, à peine réveillé, paresseusement étendu à l’ombre dans l’herbe, par un chaud après-midi d’été.
Comme bon nombre d’artistes français de son époque, Maurice RAVEL nourrit une fascination pour l’exotisme et l’orient, comme en témoigne l’ensemble de son œuvre. Son cycle de trois mélodies pour voix et orchestre, Shéhérazade, s’inspire de la célèbre légende de cette princesse captive qui endormait chaque soir son terrible mari en lui racontant un merveilleux conte, repoussant ainsi chaque jour sa condamnation à mort. L’arrangement de la deuxième chanson du cycle entendue ce soir, La Flûte enchantée, est un arrangement de Ravel lui-même.
Vox Balanea, pour flûte, violoncelle et piano amplifiés, figure parmi l’un des plus grands chefs-d’œuvre dans la musique de chambre du XXe siècle. S’inspirant des chants mélodieux des baleines, George CRUMB s’amuse et explore à travers son œuvre toutes sortes de textures, de sonorités et de couleurs, créant ainsi une fresque sonore absolument incroyable. L’œuvre, construite sous forme d’un thème et variations, dépeint la naissance du monde, du big bang à aujourd’hui, et même au-delà. Vox Balanea fut créée en 1971, à peine quelques années après le fameux voyage des Beatles en Inde et la prestation historique de Jimi Hendrix au festival Woodstock, comme nous le rappellent les atmosphères et sonorités particulières entendues dans l’oeuvre.
Si le nom de DEBUSSY est aujourd’hui fortement associé au style impressionniste français, il n’en a pas toujours été ainsi. C’est à seulement 18 ans que le compositeur français écrit son Trio en Sol pour violon, violoncelle et piano, vraisemblablement influencé par les maîtres qui l’ont précédé. Sa structure conventionnelle de quatre mouvements et son langage encore très romantique ne sont pas sans rappeler les œuvres de Gabriel Fauré et César Franck. Fait intéressant, l’œuvre que l’on croyait perdue a été retrouvée en 1982, près de cent ans après sa création, à l’Université du Michigan.
Kaija SAARIAHO s’amuse, dans sa courte œuvre pour flûte et violoncelle Mirrors, à jouer avec les textures, les timbres et les couleurs, parfois en opposant, parfois en mariant les lignes de ces deux instruments. L’œuvre, composée d’une soixantaine de « mesures », peut être déconstruite et recomposée par les interprètes, en autant que cette idée de miroir, de reflet entre les lignes, les intervalles, les nuances, soit respectée.
Lorsqu’on connaît l’ensemble de l'œuvre de RAVEL et ses multiples chefs-d’œuvre, il est surprenant de constater que la composition dont RAVEL était le plus fier était ses Chansons madécasses pour voix, flûte, violoncelle et piano. Et pourtant, en à peine plus de quinze minutes, le compositeur sait y incorporer bon nombre d’ingrédients qui caractérisent la beauté de son langage musical : poésie sublime, mariage harmonieux de timbres hétérogènes, harmonies recherchées, instrumentation ingénieuse, clins d’œil subtils aux maîtres du passé dans le traitement de la forme et du langage, pour n’en nommer que quelques-uns. La traduction des textes, qui dépeignent certains tableaux de la vie à Madagascar, est attribuée à Évariste de Parny, poète réunionnais qui aurait vécu de 1753 à 1814. Toutefois, certains remettent aujourd’hui en question sa véritable identité, suggérant que de Parny aurait plutôt été un contemporain de Ravel et que la construction d’un tel personnage ayant vécu au XVIIIe siècle serait un subterfuge pour amoindrir l’effet choquant de ses textes. Chose certaine, une aura de mystère plane au-dessus de ces Chansons…
Artistes invités

Cameron Crozman
« D’une riche imagination et d’un esprit vif » (Diapason), le violoncelliste canadien Cameron Crozman se produit en tant que soliste et chambriste au Canada, aux Etats-Unis et en Europe.
Cameron a été Révélation Classique 2019 de Radio-Canada et lauréat de la Classe d'excellence de Gautier Capuçon à la Fondation Louis Vuitton à Paris. Il enregistre des albums salués par la critique sous les étiquettes ATMA Classique et Printemps des Arts de Monté-Carlo.
Très engagé envers l’innovation dans le domaine de la musique, Cameron imagine constamment de nouvelles façon de partager son art avec le monde. Il commande et crée des nouvelles pièces aux plus grands compositeurs canadiens dont Allan Gordon Bell, Kelly-Marie Murphy, Liam Ritz, James O’Callaghan, et Alexina Louie.
Il joue actuellement sur un violoncelle c. 1750 de Gennaro Gagliano, généreusement prêté par la Banque d’Instrument du Conseil des Arts du Canada.
Meagan Milatz
Meagan Milatz, lauréate du Prix Opus 2024 Découverte de l'année, est « non seulement […] une pianiste remarquable, mais, en plus, sa palette expressive semble sans limite » (Le Devoir).
Meagan partage régulièrement la scène avec Andrew Wan, violon solo de l'Orchestre symphonique de Montréal ; Stefan Dohr, cor solo de l'Orchestre philharmonique de Berlin ; Kai Gleusteen, violon solo de l'Orchestra del Gran Teatre del Liceu de Barcelone, violoncelliste Matt Haimovitz ; et le mandoliniste Avi Avital. Meagan s'est produite en tant que soliste avec les orchestres symphoniques d'Edmonton, de Regina, de Sherbrooke et de McGill. À l’international, elle a joué en Irlande (New Ross Piano Festival), France, Espagne, Portugal, Italie, Écosse, et Malte.
Meagan Milatz a un contrat d'enregistrement de neuf albums avec ATMA Classique. Meagan est reconnaissante envers ses professeurs et éternels mentors Cherith Alexander, Ilya Poletaev, fortepianiste Tom Beghin, et Philip Chiu.
Rose Naggar-Tremblay
Récemment récompensée de la prestigieuse bourse de carrière Fernand-Lindsay, la contralto Rose Naggar-Tremblay se perfectionne depuis 2020 auprès de Lena Hellström-Färnlöf. Lors de son passage à l’Atelier lyrique de l’Opéra de Montréal, on a pu entendre Rose Naggar-Tremblay entre autres dans Svadba et Twenty-Seven.
En 2022, elle est nommée Révélation Radio-Canada 2022-2023, et remporte le Deuxième prix du Prix d’Europe 2022. Elle a également participé au lancement de l’album de l’opéra basé sur la vie et les textes de Jack Kerouac, La nuit est ma femme, dans lequel elle tenait le rôle de Gabrielle.
Elle chante récemment sous la direction de chefs réputés, dont Yannick Nézet-Séguin, Rafael Payare, Jean-Marie Zeitouni, Jacques Lacombe et Laurence Equilbey. Elle produit également son premier mini-album de chansons originales intitulé Je me souviens à toi.
En 2025 elle fera ses débuts à la Scala de Milan ainsi qu’au Théâtre des Champs Élysées , interprétant Farnace dans une version concert de Mitridate de Mozart.